Emylie Lenztner, lauréate de la Médaille de l’engagement de l’Université Paris Cité

Semaine de la santé planétaire

 

Âgée de 28 ans, Émylie Lentzner est interne en psychiatrie. Ancienne vice-présidente étudiante de l’université et membre d’un collectif de soignants, elle a co-fondé le média associatif La Fabrique des Soignants. Ce dernier diffuse des émissions thématiques sur Twitch et donne la parole aux soignants (professionnels de santé, patients, étudiants en santé…).

En 2024, elle a fait partie des 8 lauréates du prix annuel Femmes de Santé, remis par le collectif éponyme, qui récompense les femmes pour leur projet mené dans le domaine de la santé. De septembre 2024 à septembre 2025, elle a été Jeune déléguée à la Santé auprès de l’Organisation mondiale de la santé.

Émylie Lentzner souhaite plus largement soutenir les enjeux de santé mondiale auprès de la jeunesse et renforcer la démocratie sanitaire en améliorant la compréhension du fonctionnement interne des institutions politiques internationales de santé pour tous les citoyens.

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Entretien

Que représente pour vous la médaille de l’engagement de l’Université Paris Cité ?

Je suis très touchée de recevoir cette médaille. Elle récompense un engagement associatif de plusieurs années. J’ai commencé mes études il y a dix ans. Mon engagement a débuté quelque temps après la PACES, qui a été une période particulièrement éprouvante, notamment sur le plan de la santé mentale. Il y avait une forme d’absurdité et de décalage entre les enseignements et la réalité, une distance, un archaïsme dans les postures qui étaient violents. J’avais hésité à arrêter. Puis, au sein du milieu étudiant, j’ai découvert des personnes qui s’engageaient dans diverses causes.

J’ai été la première vice-présidente étudiante de l’université fusionnée. J’ai très tôt pris conscience que, en tant que femme, j’avais la responsabilité d’ouvrir la voie et de faire entendre ma voix. Cette fonction m’a permis de m’ouvrir à de nouvelles problématiques et de faire des rencontres inspirantes. J’ai eu envie de partager tout ce que j’avais appris. L’idée de créer des médias est venue naturellement, avec en toile de fond, la volonté de briser les codes : sensibiliser les futurs médecins aux enjeux sociétaux,, instaurer de meilleurs rapports avec les patients, changer les études de médecine. Être professionnel de santé n’est pas anodin : nous côtoyons toutes les couches de la société, nous sommes directement confrontés aux évolutions de celle-ci et nous avons le devoir de la comprendre pour pouvoir l’accompagner correctement

J’aurais aimé avoir la reconnaissance de l’UFR de médecine. En tant qu’étudiant en santé, nous sommes constamment pressurisés entre l’exigence de la formation, la réponse au manque de professionnels de santé à l’hôpital ou en ville, et le besoin de se construire en tant que soignant et en tant qu’individu. , Il est difficile de trouver un juste équilibre entre le temps de travail et celui de la formation, qui permet de découvrir autre chose. C’est un combat permanent. Je reste persuadée qu’être soignant ne s’apprend pas que dans les livres ou à l’hôpital, il est aussi important de s’ouvrir sur le monde.

Qu’appréciez-vous particulièrement dans le travail au sein d’une université, et en particulier l’Université Paris Cité ?

Avoir été représentante étudiante à l’Université, c’est l’école de la démocratie.  Au fil des rencontres, j’ai découvert d’autres milieux et d’autres disciplines. J’ai appris à avoir une vision plus larde, à accepter la pluralité des opinions et à avoir moins de préjugés. L’université m’a rendue plus intelligente en quelque sorte.  Mon expérience en tant que vice-présidente Étudiante permis de découvrir le fonctionnement de l’université et de comprendre que nous sommes tous acteurs du changement et parties prenantes. J’ai eu aussi la chance de rencontrer des étudiants de toutes les filières de santé, ce qui m’a permis de mieux comprendre leurs parcours, de changer ma posture vis-à-vis du travail en équipe et donc je le crois, d’être aujourd’hui un meilleur médecin.

Et pour la petite histoire, je suis née dans l’hôpital où j’ai ensuite fait mes études.

Quels ont été les moments les plus marquants de votre parcours ?

Je suis très fière d’avoir créé, co-développé et co-réalisé avec des amis le podcast Transmissions : COVID 19, Récits de jeunes soignants en temps de crise en mars/avril 2020, en pleine crise du Covid. J’étais alors en quatrième année de médecine. Notre génération de jeunes soignants n’était pas du tout représentée dans les médias, et il nous semblait important de témoigner de cette expérience sans précédent, pour pouvoir la raconter et la transmettre aux générations futures. Nous avons lancé un appel à témoignages à destination des jeunes soignants de tous les corps de métier et cela a fonctionné. Le podcast a reçu plusieurs prix. Aujourd’hui cet objet existe, et j’en suis très heureuse

Parmi les moments marquants, il y a également mon intervention en novembre 2024 aux Nations Unies en tant que jeune déléguée de l’OMS, au cours de laquelle j’ai pu porter la parole des plus vulnérables, notamment en matière de santé mentale ;

Le jour où j’ai été nommée VP étudiante. J’étais terrifiée, j’avais peur de ne pas y arriver mais au final, cette expérience m’a fait grandir ;

La première fois que j’ai porté une blouse. J’avais 18 ans et c’était mon premier jour de stage infirmier à l’hôpital Lariboisière ;

La création, en 2023, de La Fabrique des soignants, un projet de copains, alors que j’avais du mal à me projeter dans le métier de soignants. Les médias sont saturés par le sujet de la crise du système de santé et nous voulions créer un espace de parole pour ceux qui sont en première ligne qui et donnent du sens au métier de soignants.

Des projets pour la suite ?

J’ai plusieurs projets et des envies. Dans l’immédiat, je vais effectuer un stage de 6 mois à Lille à l’hôpital d’Armentières, dans un service qui a travaillé avec le Centre Collaborateur de l’OMS en santé mentale pour limiter le recours à la contention et l’isolement chez les patients en psychiatrie au prochain semestre. Je vais me former à la psychiatrie légale, d’abord en France puis idéalement aux États-Unis dans un futur proche. J’aimerais également suivre une formation de journalisme à l’avenir.